© Thomas De Jesus

Heïdi SerraChargée de recherche CNRS à l’Institut de génétique, reproduction et développement (iGReD, CNRS/Inserm/Université Clermont Auvergne)

Médaille de bronze du CNRS

Heïdi Serra, chargée de recherche CNRS à l’Institut de génétique, reproduction et développement1 , décrypte les mécanismes de la recombinaison chez les plantes. Elle est récompensée par la médaille de bronze du CNRS.

Ce qui fascine Heïdi Serra, c’est la manière dont les plantes s’adaptent à la complexité génétique. Après une thèse à Clermont-Ferrand sur la réparation des cassures de l’ADN, elle part à Cambridge explorer un autre terrain : la méiose. Lors de ce processus propre à la reproduction, l’ADN subit également des cassures, cette fois-ci contrôlées, à l’origine d’échanges entre chromosomes (crossing-over) essentiels à la diversité génétique. Mais que se passe-t-il quand ces chromosomes viennent d’espèces différentes ?

C’est cette question qu’elle poursuit depuis son retour en France. Après un post-doctorat à l’INRAE, elle rejoint le CNRS en 2021 pour s’attaquer à un défi de taille : comprendre comment les plantes dites allopolyploïdes — issues d’un croisement entre espèces — parviennent à stabiliser leur génome. Car si ces hybrides sont instables au départ, ils peuvent, une fois stabilisés, donner naissance à de nouvelles espèces qui combinent les caractères avantageux de leurs parents.

  • 1CNRS / Inserm / Université Clermont Auvergne
Comprendre comment les plantes hybrides stabilisent leur génome, c’est ouvrir de nouvelles voies pour une agriculture plus résiliente.

Pour lever le voile sur ce phénomène, Heïdi Serra mise sur une plante discrète mais redoutablement efficace : Arabidopsis suecica, issue d’une hybridation naturelle. « C’est un modèle idéal qui présente les avantages d’une plante simple, mais qui permet d’adresser les questions complexes liées à la polyploïdie », précise-t-elle. En comparant des plantes recréées récemment en laboratoire à d’autres formées naturellement il y a 16 000 ans, son équipe a notamment mis en évidence un mécanisme clé. Les plus anciennes ont appris à éviter les échanges entre chromosomes d’origine différente, tandis que les plus récentes peinent à stabiliser leur méiose et sont donc peu fertiles. Certaines d’entre elles sont cependant capables de s’adapter en seulement quelques générations !

Grâce à son projet ERC MeioPoly1  lancé en 2024, elle s’entoure de spécialistes aux profils complémentaires pour élucider les mécanismes qui sous-tendent cette adaptation. Microscopie haute résolution, génomique, épigénomique… Son équipe croise les approches pour décrypter les rouages de la méiose et proposer ainsi de nouvelles stratégies pour accélérer la production d’espèces innovantes pour une agriculture plus durable.

  • 1 Meiotic Adaptation to Allopolyploidy
La complémentarité des membres de l’équipe et le travail en synergie sont essentiels à la réussite de ce projet.