© Vincent Moncorgé - CNRS / Femmes & Sciences / Université Clermont Auvergne - La science taille XX elles - 2024

Véronique Genevois GomendyPédologue cartographe

Véronique Genevois Gomendy est spécialiste de l’étude de la répartition des sols au sein des paysages. Elle collabore avec l’Université Clermont Auvergne pour transmettre aux étudiantes et étudiants les bases de la pédologie et apporte son expertise à diverses institutions de recherche, comme VetAgro Sup, l’INRAE, l’Institut Français de la Vigne et du Vin ou le Parc des Volcans d’Auvergne. Elle est convaincue qu’une meilleure connaissance des sols est une des clés pour relever le défi climatique.

Certaines ont la tête dans les nuages et regardent l’horizon, Véronique Genevois Gomendy, elle, l’a plutôt dans la terre. Elle sonde les mystères qui se trouvent sous nos pieds. Son objet d’étude, la pédologie, a obtenu le statut de discipline rare en 2023. Le nombre de spécialistes qui enseignent cette matière dans les universités françaises se compte sur les doigts d’un pied. La scientifique mesure sa chance : elle a été formée par des pédologues à une époque où existait encore un centre CNRS de Pédologie Biologique, à l’Université de Lorraine. Cette passion insolite est née d’un concours de circonstances. Attirée par l’archéologie, elle comprend dès son premier stage que ce ne sont pas les ruines qui l’intéressent, mais bien les couches de sols qui racontent une histoire plus ancienne, vieille de milliers voire de millions d’années ! Elle se passionne pour tous les témoins du passé mais également pour les plantes, minéraux, volcans. Ce que la pédologue aime par-dessus tout, c’est se confronter à la réalité, parcourir le territoire auvergnat en creusant des trous, sa tarière à la main ainsi qu’elle pose sur la photo. Telle une enquêtrice, elle sonde le terrain à la recherche d’indices qui lui permettront de comprendre comment s’organisent les sols en fonction de la géologie, du climat, de la géomorphologie… et ainsi de proposer des cartes. Associés à des analyses en laboratoire, ses travaux permettent aux équipes de recherche et aux acteurs et actrices du territoire de comprendre la capacité des sols à produire et à retenir l’eau, et à être source de biodiversité. La première fois qu’elle a ausculté une terre, Véronique Genevois Gomendy s’en souvient comme si c’était hier. C’était à Avignon, elle était étudiante en master de recherche et devait explorer les effets des feux de forêt sur les sols. Elle a trouvé sa voie : cap sur la Brie et ses plaines cultivées. Là, elle entame une thèse de doctorat sur l’évolution des propriétés physiques et hydriques des sols, c’est-à-dire la circulation et le stockage de l’eau en lien avec la structure des sols. En 1999, elle décide de s’ancrer dans les volcans du Cantal. On se soucie peu du sol à l’époque, les perspectives professionnelles sont maigres. Qu’à cela ne tienne : la scientifique décide de monter un cabinet d’études des sols et de l’environnement et répond à des appels d’offres et des demandes d’expertises, tout en élevant ses deux enfants. Dix ans plus tard, l’époque est à la prise de conscience : on commence (enfin !) à se soucier des conséquences du dérèglement climatique. Les espaces naturels doivent être davantage documentés et l’expertise de la pédologue-cartographe est sollicitée en 2013. Elle prend la tête du programme « Sols et Territoires d’Auvergne » lancé par VetAgro Sup, dont l’objectif est la création d’une carte des sols de la région. De cette initiative naissent les premières cartes des grands types de sols présents sur les départements du Cantal, du Puy-de-Dôme et de la Haute-Loire. « Ce travail est crucial », explique-t-elle avec passion, « car dans le cadre du changement climatique, des problématiques de sécurité alimentaire et de gestion de la ressource en eau, la connaissance spatialisée des sols est une des clés à prendre en compte pour optimiser leurs usages, adapter les pratiques en agriculture, construire des politiques d’utilisation des territoires raisonnées et raisonnables. »